Le E-100 est un char lourd de 138 tonnes issu du projet de la nouvelle standardisation des blindés de combat allemands de la Panzerwaffe à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il fait partie d’une série de projets - les E-serien (Entwicklung-serien, littéralement : séries de développement) - lancée par Heinrich Ernst Kniekamp en 1942 en vue du remplacement des chars de combat (Panzerkampfwagen) et des chasseurs de chars (Panzerjagern) de l’époque après le rude choc que constitua pour les tacticiens et stratèges allemands la rencontre avec les chars soviétiques du type T34 et KV-1 lors de l’invasion de l’URSS en 1941. L’ensemble du programme comprenait six engins qui devaient utiliser des pièces standardisées afin d’en faciliter la production et la maintenance - un des soucis majeurs du ministre de l’armement du Troisième Reich, Albert Speer. Approuvé par Hitler en 1943, le projet en cours fut finalement abandonné en 1944, tant du fait de la versatilité du Führer qu’en raison du fait que le complexe militaro-industriel allemand, dévastée par le programme de bombardement stratégique allié, n’était plus alors en mesure d’y donner une suite concrète. Une certaine confusion continue à régner, même dans les milieux spécialisés dans l’histoire de l’armement du Troisième Reich, quant à l’utilisation du nom Maus ("souris") qui en fait était attribué non pas à un véhicule déterminé mais à l’ensemble du programme de char de 100 tonnes - confusion entretenue par le fait que plusieurs châssis différents furent fabriqués par différents constructeurs, comme ce fut le cas avec le Tiger, le Königtiger et le Jagdtiger - un seul type de tourelle ayant été produit pour l’ensemble du projet. La première maquette fut présentée en présence d’Albert Speer en 1943 mais la commande initiale de 150 unités prévues fut annulée à la fin de l’année. L’armement principal du E-100 aurait pu être : un canon 128 mm KwK 44 L/55 dérivé d’une pièce de Flak particulièrement performante qui sera d’ailleurs installée sur le Jagdtiger; un canon 150 mm KwK 44 L/38 ou un canon 170 mm KwK 44. Il était également prévu un tube coaxial de 75 mm PAK et des mitrailleuses MG34 pour la défense rapprochée. Porsche et Krupp continuèrent cependant l’étude et les tests. Plusieurs prototypes V1 puis V2 furent construits et testés à Essen, Boblingen et Kummersdorf mais le Maus ne quitta jamais les terrains d’essai. Un autre châssis fut construit par Henschel à Paderborn début 1945. Le prototype V2 fut apparemment sabordé par le personnel du Centre d’essai de Kummersdorf. Plusieurs éléments non assemblés (châssis, tourelles non armées, tubes avec mantelet) furent capturés par les Britanniques en 1945. Le E-100 souffrait d’une mobilité très réduite due à sa masse de 138 tonnes ainsi qu’une motorisation trop faible et peu fiable (vitesse maximale variant entre 20 et 40 km/h selon le terrain). Il fut estimé que le Maus, en cas de défaillance technique en zone de combat, devrait être remorqué par 2 autres de ses congénères - une pratique qui fut adoptée lors des premiers engagements du Tigre et ensuite prohibée à la suite de la mise en service des véhicules de remorquage de chars Bergepanther. De plus, des problèmes pratiques se posaient quant à son déplacement, particulièrement lors de la traversée des ponts. Son armement lui permettait cependant d’engager ses adversaires à longue portée et de détruire à plus de 3 500 m tous les chars alliés tout en restant hors de portée de toute riposte, faisant ainsi de lui une forteresse antichar « mobile » quasiment invulnérable. Comme beaucoup d’autres projets hitlériens tout aussi mégalomaniaques, ce programme « E-100 » n’eut finalement d’autre réelle utilité que de servir la progagande fantasmagorique de Joseph Goebbels aux heures les plus sombres de la débâcle nazie.