Les Mustang I britanniques
Comme le NA-73X n'a révélé que peu de défauts et de problèmes, la production des exemplaires de série pour la RAF, NA-73, démarre presque immédiatement. Le premier avion de série vole dès le 23 avril 1941, bien avant la date prévue originellement. Il est retenu par North American Aviation aux États-Unis pour des essais plus poussés et n'est donc lui non plus jamais armé. Le premier Mustang à être armé est le second exemplaire de série qui est aussi le premier à être envoyé en Angleterre, où il arrive le 24 octobre. Les vingt premiers arrivés en Grande-Bretagne sont alors utilisés pour des tests.
Le AM106 expérimente par exemple l'emport de huit roquettes, de réservoirs largables et même le montage sous l'aile de deux canons Vickers de 40 mm. L'armement normal est de quatre mitrailleuses de 12,7 mm et quatre de 7,62 mm. Tous les Mustang de la RAF sont en outre dotés d'une caméra oblique K-24, derrière le pilote, et d'une cinémitrailleuse, sur le bout de l'aile gauche. Par la suite une caméra verticale est ajoutée en avant de la roulette de queue. Dès décembre 1940, les Britanniques commandent 300 avions de plus, désignés NA-83. Ils ne différent des précédents NA-73 que par l'usage de nouvelles pipes d'échappement aplaties dont la forme évoque une queue de poisson. Les radios, les viseurs et divers autres équipements fournis par l'industrie britannique ne sont montés qu'à l'arrivée en Angleterre. Ils commencent à être versés dans les unités de combat en janvier 1942 et le 26e escadron de chasse est déclaré opérationnel en février, deux autres le sont en avril et 8 en juin. Les Britanniques, soucieux du fait de la grande ressemblance générale de l'appareil avec le Me-109, font peindre des bandes jaunes autour des ailes pour faciliter son identification. Également conscients de ses limitations en altitude, ils utilisent l'avion pour des reconnaissances à basse altitude au-dessus de la France occupée. Ces missions appelées Poplard utilisaient deux Mustang, l'un s'occupant de photographier, l'autre le couvrant contre la chasse allemande.
Le 10 mai, l'avion mène sa première action de combat, le mitraillage d'un aérodrome et d'un train de ravitaillement allemand sur la côte française par le Flying Officer G. N. Dawson du 26e escadron. Un premier appareil est perdu en juillet lors de ces missions. Le 19 août 1942, lors des opérations liées au débarquement de Dieppe, marque la première victoire aérienne de l'avion (un Focke-Wulf Fw 190). Curieusement, ce fait d'armes est l'œuvre d'un pilote américain engagé volontaire au 414e escadron canadien. De nouvelles missions sont alors confiées aux paires de Mustang, les Rhubarbs, qui visent des objectifs ponctuels en France, Belgique et Hollande occupées, et les Rangers dont les objectifs sont simplement d'opportunité. Ces objectifs sont assez limités, pour éviter les pertes au sein des populations civiles des pays occupés par l'ennemi. D'autres avions sont affectés au Costal Command pour intercepter les raids de chasseurs bombardiers Fw 190 contre les ports de la Manche. En octobre 1942, au cours d'une mission sur Dortmund, le Mustang devient le premier chasseur monomoteur à survoler et à attaquer l'Allemagne, au-dessus de laquelle les restrictions d'objectifs sont nettement assouplies.
À cette époque, le premier lot de 318 avions est entièrement livré, ainsi que la plupart du deuxième de 300. Les 618 Mustangs I équipent 14 escadrons : les 2e, 4e, 16e, 26e, 63e, 169e, 239e, 241e, 268e, et 613e de la RAF, les 400e, 414e et 430e de la RCAF et le 309e polonais de la RAF. Les 93 Mustang IA servent dans les escadrons 2, 63, 168, 170, 268 et 516 de la RAF. Ces unités opèrent au sein du Army Cooperation Command, jusqu'à la dissolution de celui-ci en juin 1943. Après un passage au sein du Fighter Command, elles sont affectées à la Second Tactical Air Force pour soutenir le débarquement en Europe. En juin 1944, trois escadrilles de la RAF et deux de la RCAF opèrent toujours sur Mustang I et II. Certaines restent en activité jusqu'en 1945, détruisant pendant ces 30 mois plus de 200 locomotives et 200 péniches, pour la perte d'un avion par la Luftwaffe, de cinq par la Flak et la disparition inexpliquée de deux autres.